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AFP - 13 décembre 2008 -
Les deux sexagénaires sont
les seuls individus nommément cités comme bailleurs de
fonds du Congrès national pour la défense du peuple
(CNDP) de Laurent Nkunda, dans un rapport d'experts des Nations unies
publié vendredi, qui accuse également le Rwanda d'avoir
apporté un soutien multiforme à la rébellion.
Ses auteurs recommandent l'adoption de sanctions, gel des
avoirs financiers et interdiction de voyager, contre un certain
nombre d'acteurs impliqués dans le conflit au Nord-Kivu (est
de la RDC).
Tribert Rujugiro Ayabatwa, un
conseiller du président rwandais et fondateur du Rwandan
Investment Bank (RIB), un conglomérat privé soutenu par
le gouvernement, joue un rôle dans le financement du CNDP",
écrivent-ils.
Décrit dans la
presse rwandaise comme "l'homme le plus riche du pays", il
a des intérêts dans le secteur de l'énergie, du
ciment, du thé, des banques, de l'immobilier...
Tribert Rujugiro possède également des fermes
au Nord-Kivu sur un territoire contrôlé par les rebelles
du Tutsi congolais Laurent Nkunda. Il y a rencontré
fréquemment en 2006 des leaders du CNDP qui "l'accueillaient
avec honneur", selon un témoin cité dans le
rapport.
Des documents légaux montrent
qu'il a donné procuration sur une des fermes au Colonel
Innocent Gahizi, un haut responsable du CNDP en charge de la
logistique du mouvement.
Les experts de l'ONU
ont eu accès à un e-mail échangé le 6
juin 2008 entre les deux hommes : le colonel Gahizi y explique que "le
matériel" et "les hommes sont prêts" à
avancer vers "la ville".
Deux mois et
demi plus tard, les combats ont repris au Nord-Kivu entre l'armée
congolaise et le CNDP. Les rebelles ont rapidement conquis de
nouvelles zones avant de s'arrêter aux portes de Goma, la
capitale provinciale.
Dans un autre courrier
électronique, d'août 2007, M. Rujugiro remercie un de
ses employés, basé à Dubaï, de s'être
occupé du versement de 120.000 dollars pour "les soldats"
de "notre ami Laurent N."
M. Rujugiro
est connu pour avoir été l'un des principaux bailleurs
du Front patriotique rwandais (FPR) pendant la guerre civile
rwandaise de 1990-1994, qui s'est conclue par l'arrivée au
pouvoir du FPR et de son leader Paul Kagame.
Ses
liens actuels avec le régime sont plus difficiles à
documenter. Seule une page d'archives du site officiel du FPR évoque
son élection fin 2005 au sein du comité national
exécutif du parti.
Le 13 octobre dernier,
il a été arrêté à Londres en
application d'un mandat d'arrêt émis par la justice
sud-africaine qui le soupçonne de fraude fiscale à
grande échelle. Une procédure d'extradition est en
cours.
Ses déboires judiciaires sont un
autre point commun avec Raphaël Soriano alias Katebe Katoto, "un
riche opposant congolais originaire de la province du Katanga
(sud-est) aujourd'hui de nationalité belge", également
mis en cause par les experts de l'ONU.
M. Soriano
est poursuivi par la justice britannique pour détournement de
fonds publics. Il est accusé d'avoir participé à
la disparition de millions de dollars de l'Etat zambien.
Homme d'affaires qui a fait fortune notamment dans les
pêcheries, il n'est pas un poids-lourd de la scène
politique congolaise, même si il a toujours été
très actif en coulisses.
Il fut brièvement
vice-président en 2003 du Rassemblement congolais pour la
démocratie (RCD, rébellion soutenue par le Rwanda)
avant de s'établir à Bruges en Belgique.
Les experts de l'ONU l'accusent de financer le CNDP, ainsi
que les Forces républicaines fédéralistes (FRF),
un groupe armé tutsi du Sud-Kivu. Ils ont établi qu'en
2006 un transfert de 25.000 dollars a eu lieu entre le compte de son
épouse et celui de la femme de Laurent Nkunda, au départ d'un compte bancaire ouvert à la Banque ING à Bruges.